En mathématiques et en physique, dans le domaine de l’analyse vectorielle, le théorème de Helmholtz-Hodge, également appelé théorème fondamental du calcul vectoriel, assure qu'un champ vectoriel se décompose en une composante « longitudinale » (irrotationnelle) et une composante « transverse » (solénoïdale), soit la somme du gradient d’un champ scalaire et du rotationnel d’un champ vectoriel.
Ce résultat possède des applications importantes en électromagnétisme et en mécanique des fluides ; il est également exploité en sismologie.
Théorème de Helmholtz-Hodge —
Soit un champ vectoriel de classe où est soit un domaine compact et connexe de frontière supposée régulière (ou régulière par morceaux), soit lui-même.
Alors il existe un champ vectoriel et un champ scalaire définis sur tels que
Par ailleurs, ces deux champs peuvent être caractérisés par les expressions suivantes :
- Si est compact :
- Si et si décroît à l'infini comme , alors les relations précédentes restent valables en ignorant les intégrales de surface. D’autre part, parmi les champs qui décroissent à l’infini (ce qui est le cas s’ils sont définis par les relations précédentes), la décomposition est unique ( n’est défini qu’à une constante près et ne l’est qu’à un gradient près) et les deux termes de la décomposition sont orthogonaux avec le produit scalaire de , c'est-à-dire :
Justification
Considérons d’abord la situation où est compact.
Le laplacien agissant sur la variable implique
où est la « fonction » de Dirac.
Ainsi, pour tout volume contenant , il vient
De l’identité , il découle la relation suivante où chaque opérateur agit sur la variable :
Les identités vectorielles
conduisent aux expressions suivantes dans lesquelles les opérateurs des membres de gauche agissent sur la variable et ceux des membres de droite agissent sur la variable :
La conclusion s’obtient après substitution et application du théorème de la divergence au premier terme et du théorème du rotationnel au second terme.
Lorsque , l’hypothèse de décroissance de qui décroît à l'infini comme permet d’assurer que les intégrales de surface convergent vers 0 lorsque le domaine d’intégration s’étend progressivement à l’espace entier (sphères concentriques par exemple).
Afin de montrer l’orthogonalité de la décomposition de , l’identité
et le théorème de la divergence impliquent :
Avec l’hypothèse des champs qui décroissent à l’infini, l’intégrale de surface converge vers 0, ce qui montre l’orthogonalité des composantes lorsque .
Lorsque , l’orthogonalité de sa décomposition implique son unicité : les deux composantes sont donc nécessairement nulles dans ce cas particulier. Ainsi, les différences, composante par composante, de deux décompositions d’un champ quelconque correspondent à une décomposition du champ nul : ces différences sont donc nécessairement nulles.
Remarques :
- L’égalité s’appelle la décomposition de Helmholtz.
- Lorsque le domaine est borné, il n’est pas toujours possible de garantir l’orthogonalité de la décomposition et elle n’est jamais unique.
- L’hypothèse de connexité n’est pas essentielle puisque le théorème peut s’appliquer séparément à chaque partie connexe.
- Certaines hypothèses de l’énoncé peuvent être affaiblies, en particulier sur la régularité de et la forme de , ou sur la décroissance de à l’infini[1].
Démonstration
On écrit V comme une transformée de Fourier :
La transformée de Fourier d'un champ scalaire est elle-même un champ scalaire, et la transformée de Fourier d'un champ de vecteur est un champ de vecteur de même dimension.
À présent on considère les champs scalaires et vectoriels suivant :
Ainsi
Le principal souci avec cette approche est la question de la convergence des transformées de Fourier, notamment dans le cas où le domaine est en entier.
Considérons une décomposition d’un champ supposée vérifiée sur un domaine donné a priori quelconque :
Partant d’un vecteur constant et non nul choisi arbitrairement, puis définissant les deux champs
qui vérifient
on obtient une deuxième décomposition distincte de la première en se basant sur les champs
Par ailleurs, même si les termes de la première décomposition sont orthogonaux, il est toujours possible de choisir un de norme suffisamment élevée de sorte que ce ne soit plus le cas pour la seconde.
Cet exemple simple montre que sur un domaine compact, même avec une frontière parfaitement régulière (une sphère par exemple), l’unicité de la décomposition n’est jamais assurée, même pour un champ infiniment régulier et quelles que soient les conditions de bord qu’il puisse satisfaire.
Dans par contre, un champ constant non nul ne respecterait pas l’hypothèse du théorème relative à la décroissance à l’infini.
Alors que le théorème précédent affirme une décomposition d’un champ en une composante solénoïdale et une composante irrotationnelle, la formulation suivante affirme une recomposition d’un champ à partir d’une divergence et d’un rotationnel. Bien que ces deux résultats ne soient pas directement liés, les arguments des preuves respectives se basent sur des relations semblables. Ils sont toutefois dénommés théorème de Helmholtz.
Théorème de Helmholtz —
Soient un champ scalaire et un champ vectoriel solénoïdal définis dans et tous deux supposés décroître à l’infini comme . Alors il existe un champ vectoriel tel que
De plus, il existe un unique champ satisfaisant ces propriétés et décroissant à l’infini comme .
Justification
Par l’hypothèse de décroissance des champs qui donne un sens à la relation ci-dessous, posons
où et où les deux opérateurs agissent sur la variable
Il s’agit de montrer que ce candidat vérifie les propriétés attendues.
A l’aide de l’identité , il vient
Le second terme étant égal il suffit alors de montrer que le premier terme est nul.
Considérons un domaine borné qui s’étend progressivement à l’espace entier.
L’égalité suivante (où l’opérateur du membre de gauche agit sur la variable et ceux du membre de droite agissent sur la variable ) :
dans laquelle permet d’exprimer le premier terme sous la forme
par le théorème de la divergence. L’hypothèse de décroissance des champs permet d’affirmer que ce terme tend vers 0 lorsque le domaine s’étend à l’espace entier.
On a ainsi trouvé un champ satisfaisant les propriétés requises.
Montrons encore que est unique si ce champ décroît à l’infini comme . La différence entre deux tels candidats est encore un champ qui décroît à l’infini comme . D’après le théorème de Helmholtz-Hodge, la décomposition de Helmholtz de ce champ est unique. Puisque sa divergence et son rotationnel sont nuls, les deux champs de sa décomposition le sont également, ceci à cause des relations qui les caractérisent. Le champ est finalement nul et les deux candidats sont nécessairement identiques.
Remarque :
Le champ qui est choisi comme candidat dans la démonstration précédente est construit à partir de la décomposition de Helmholtz et des expressions caractérisant et dans le théorème de Helmholtz-Hodge. En effet :
correspondant à la décomposition
s’écrivent respectivement sur un compact :
Ainsi, lorsque , les intégrales de surface disparaissent, ce qui conduit au corollaire suivant :
Corollaire —
Soient un champ scalaire et un champ vectoriel solénoïdal définis dans et tous deux à support compact . Alors il existe un champ vectoriel satisfaisant
qui est défini par où :
De plus, il existe un unique champ satisfaisant les propriétés 1. et 2. et décroissant à l’infini comme .
Dans et sous les hypothèses du théorème de Helmholtz-Hodge, les expressions caractérisant les champs et permettent d’affirmer les propriétés suivantes :
- Si le champ est irrotationnel , alors il dérive d’un potentiel scalaire : il existe un champ scalaire tel que
- Si le champ est solénoïdal , alors il dérive d’un potentiel vecteur : il existe un champ vectoriel tel que
Sur un domaine qui n’est qu’une partie de , l’existence de potentiels est plus complexe : en particulier, elle n’est en aucun cas assurée lorsque le domaine admet un « trou ».
Si est connexe par arcs et simplement connexe (sans « trous »), un champ continu et irrotationnel admet un potentiel scalaire.
On le montre en choisissant un point arbitraire dans , puis en définissant « explicitement » pour tout dans :
- où est une courbe orientée reliant à .
La relation conduit bien à et la consistance de cette définition découle du théorème du rotationnel (celui qui identifie le flux du rotationnel d’un champ à travers une surface et la circulation du champ sur sa frontière) car il assure que la valeur est indépendante du choix du chemin : pour deux chemins reliant , leur réunion est une courbe fermée sur laquelle une surface de bord peut être construite (c’est précisément ici qu’intervient l’hypothèse de connexité simple).
Si est un ouvert étoilé et que le champ est solénoïdal et de classe , alors il dérive d’un potentiel vecteur : il existe un champ vectoriel tel que
Après l’avoir formulée adéquatement en termes de formes différentielles, cette propriété est une application directe du lemme de Poincaré qui affirme qu’une forme différentielle de degré un, de classe sur un ouvert étoilé est exacte si et seulement si elle est fermée.
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