[go: up one dir, main page]

Aller au contenu

Page:NRF 14.djvu/902

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

896 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Je n'eus pas tout d'abord le loisir d'expliquer leur pré- sence à cette heure. Le nègre en me voyant leva les bras, avec une allégresse compromettante et le petit vieux se mit à gambader ainsi qu'un simonnet.

Un puissant coup d'œilde ma part leur fit comprendre que le terrain n'était guère favorable aux explications. Ces deux démons ne manquaient 'pas de finesse. Ils comprirent le côté scabreux de la situation et Maître Léonard s'avançant le chapeau à la main s'exprima en ces termes :

— Monsieur, nous n'avons pas l'honneur de vous connaître. (Je respirai.) Nous sommes deux malheureux acrobates du cirque Pantalon que la dureté des temps et le petit nombre des amateurs de jeux icariens ont obligé à fermer ses portes, il y a quelques jours. M. Pantalon n'ayant point de fonds à nous remettre nous donna néanmoins la clef des champs. Voici quarante^huit heures que nous n'avons pas mangé et je comprends ce pauvre bouc savant dans cette disgrâce. Si vous voulez seule- ment nous donner de quoi nous restaurer, nous vous paierons avec ce que nous savons faire, c'est-à-dire des cabrioles, des rétablissements sur les poignets, l'arbre fourchu et le double saut périlleux à échap- pement libre dans Tazur protecteur de cette verte cam- pagne.

Le bonhomme remit alors son chapeau et attendit.

Il ne me restait que la ressource de conduire la troupe errante jusqu'à mon domicile.

Nous y parvînmes non sans avoir augmenté la bande des curieux inutiles que j'abandonnai devant ma porte fermée.

�� �