Vélocipède
Les vélocipèdes sont l'ensemble des cycles à propulsion humaine, quel que soit leur nombre de roues.
Vélocipède fut le nom français donné par Karl Drais à sa draisienne, pour son importation en France en 1818, avant de devenir un nom générique. Il est à l'origine du terme vélo, utilisé en langage courant pour désigner une bicyclette[1].
Histoire
[modifier | modifier le code]En 1818[2], l'avocat Louis-Joseph Dineur emploie le terme « vélocipède »[3] lorsqu'il dépose une demande d'un brevet d'importation de cinq ans au nom de son client Karl Drais qui cherche à commercialiser sa draisienne, présentée l'année précédente à Mannheim. Il a auparavant hésité à utiliser « machine à courir », traduction de l'allemand « Laufmaschine ». Le 5 avril 1818, le Journal de Paris confirme cette appellation en l'utilisant, associée à « draisienne », pour annoncer une course au jardin du Luxembourg[1]. La draisienne comportait deux parties principales, le cadre assez bas pour que les pieds puissent toucher le sol et le train de direction relié au cadre par un pivot commandé par un timon directeur (dénomination du guidon).
Cette même année on relève un brevet pour un vélocipède à trois roues déposé en Grande-Bretagne par Denis Johnson. Mais une première application pourrait remonter à 1680 en Allemagne. En 1789 apparaissent les premières appellations de bicycle et de tricycle adulte ; ainsi que la création par les français Blanchard et Maguier d'un premier type à pédales[4]. Selon l'Office du Tourisme de Cholet[5], s'appuyant sur des travaux de l'historien Geoffrey Ratouis - dès 1840, le choletais Victor Foyer, serrurier-carrossier, aurait fabriqué un vélocipède à trois roues, complètement en fer léger, avec selle et frein[6]. Du fait de sa stabilité, le tricycle adulte va connaître un grand succès.
Le vélocipède tombé dans un relatif oubli fut amélioré par l'artisan serrurier Pierre Michaux, qui aurait inventé la pédale, avec son fils Ernest en 1861, produisant une machine appelée « vélocipède-Michaux » ou michaudine, vendue pour un minimum de 250 francs (soit une année de salaire d'ouvrier manuel)[Note 1]. L'engin connaît un beau succès dans la haute société : le fils de Napoléon III se met en tête de convertir toute la cour au « vélocipède », au point qu'on le surnomme « Vélocipède IV »[7]. Le Français Pierre Lallement a déposé le le brevet n° 59,915 pour le vélocipède. Comme il n'avait pas de ressort au siège, il fut aussi appelé "tapecul". Il a été amélioré dans les années 1869-1870 notamment par des bandages en caoutchouc plein (premier brevet pris le 24 novembre 1869 par Clément Ader) remplaçant le cerclage de fer et par des roues aux rayons métalliques en tension (brevet n° 86705 pris le 4 août 1869 par Eugène Meyer). Parmi ces inventions, le vélocipède à vapeur à propulsion par la roue arrière construit par Louis-Guillaume Perreaux, avec les établissements Michaux, dont un modèle existe au musée d'Île-de-France à Sceaux préfigure la moto : c'est le premier cyclomoteur.
Des courses sur piste et sur routes sont organisées, la première course de fond (sur route) ayant relié Paris à Rouen le à l'initiative du bi-hebdomadaire Le Vélocipède illustré dirigé par Richard Lesclide et du fabricant la Compagnie parisienne des vélocipèdes. L'éclosion d'une presse spécialisée, notamment Le Vélocipède Illustré est un témoignage de cet engouement.
La guerre de 1870 met fin à cette euphorie, qui traverse la Manche au profit des industries britanniques.
En 1886, Thomas Stevens publie le récit du premier tour du monde à vélocipède : en fait il s'agit d'un grand-bi. En 1892, Frank Lenz se lance à son tour dans l'aventure comme correspondant du magazine Outing avec un engin plus moderne entraîné par une chaîne et disposant de roues équipées de pneumatiques, mais, après avoir traversé les États-Unis, le Japon et l'Asie, il disparaît début 1893 en Turquie orientale[8].
Par la suite, les améliorations se multiplient. La chaîne et les pignons permettent d'installer le pédalier sous la selle. Dès 1889, les vélos peuvent rouler sur des boudins de caoutchouc gonflés d'air et fixés à la jante. Système plus confortable mais peu pratique : réparer ou changer un pneu crevé est une opération longue et délicate. Édouard et son frère André Michelin inventent un nouveau système de pneu avec chambre à air, qui est breveté en 1891. On raconte que l'idée leur serait venue après avoir rencontré un cycliste anglais demandant une réparation lors de son passage à Clermont-Ferrand. Le nouveau pneu est mis à l'épreuve de la réalité la même année par Charles Terront qui sort vainqueur de la première course cycliste Paris-Brest-Paris.
Ainsi équipé, le vélo prend son envol auprès d'une bourgeoisie en mal de sensations fortes, entraînée par quelques mordus célèbres comme Alfred Jarry ou Émile Zola. En mai 1892, La Bicyclette : journal d'informations vélocipédiques est fondé à Paris[9], puis en décembre, Le Vélo, un quotidien, fait son apparition, bientôt au milieu de dizaine d'autres périodiques sur le même sujet, dont l'ancêtre est Le Véloce-sport, lancé à Bordeaux en mars 1885, et qui fut influencé par la mode venue d'Angleterre.
Au premier Congrès international de l'automobile, en 1900, Georges Forestier rappelle le rôle du cyclisme ayant préparé et facilité la naissance de l'automobile[10].
Peu à peu le « vélo », produit en séries de plus en plus importantes, quitte le statut de loisir élégant pour devenir un engin de randonnée, de sport et même de transport : en 1914, plusieurs millions de Français l'avaient adopté, mettant à profit la dernière grande invention vélocipédique, le dérailleur promu et amélioré dans les années 1900 par le grand randonneur stéphanois promoteur du cyclotourisme Paul de Vivie au surnom évocateur : « Vélocio »[7]. Pendant la Grande Guerre, le vélo connaît des applications utilitaires.
Du vélocipède à la bicyclette
[modifier | modifier le code]Les trois dernières décennies du XIXe siècle ont été consacrées au passage du vélocipède à la bicyclette. Une grande activité inventive est constatée dans les dépôts de brevets dans les années 1868, 1869 et 1870 jusqu'à la guerre de 1870. Vers 1880, un rythme soutenu dans les dépôts de brevets est retrouvé. De grandes sociétés industrielles comme les Frères Peugeot en 1882, la Manufacture d'armes et de cycles de Saint-Étienne en 1885 se lancent dans le cycle et font progresser les dépôts de brevets dans les années 1890. Cette année-là, on enregistre 101 dépôts de brevets, en 1897 ils sont 974, contre 217 pour l'automobile[11].
L 'évolution vers la bicyclette est caractérisée par les brevets d'invention déposés en :
- 1894 : la roue libre, par Ernst Sachs (brevet allemand n° 84193) ;
- 1897 : le dérailleur, par Charles M. Linley (brevet anglais n° 19280) ;
- 1898 : le freinage par rétropédalage ;
- 1901 : le changement de vitesse à l’anglaise, par James Archer (brevet anglais n° 15638) ;
- 1905 : le changement de vitesse par dérailleur[11].
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Un vélo Michaux de 1861.
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Vélocipède de Louis-Napoléon Bonaparte, dit Vélocipède IV (le fils de Napoléon III), vers 1869.
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Un vélocipède à trois roues de 1880.
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Évolution du vélocipède ou bicyclette, de la draisienne à nos jours.
Notes et références
[modifier | modifier le code]Références
[modifier | modifier le code]- Vélocipède, Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le 29 septembre 2009).
- La première course -officieuse- de vélocipèdes (draisiennes) eut lieu au Jardin du Luxembourg, en 1818 L'Industrie vélocipédique, 10-22 janvier 1894, p.20.
- Bulletin des lois de la République française, Volume 6, p. 279 lire (consulté le 28/09/2009).
- « Histoire et évolution du tricycle adulte : Histoire et origine du tricycle adulte », sur Letricycle-adulte.fr (consulté le )
- Charles Vincent et Cécile Langlois, « Les célébrités du Choletais », sur 49b.celebrites.htm, Guide pratique et touristique, 2007-2008 (consulté le ), p. 30-31
- Geoffrey Ratouis : Dossier 2 - Exposition - Evolution Economique du choletais - Guide pratique et touristique 2007-2008, page 30 - Office du Tourisme Cholet
- Journal La Croix, 2 et 3 juillet 2011.
- David Herlihy : Le Cycliste perdu, Traduction française 2011, éd. J-C Lattès.
- Notice d'autorité sur data.bnf.fr.
- Jacques Ickx, Ainsi naquit l'automobile, Lausanne, Edita, 1971, p. 129.
- Gérard Emptoz, « Du grand bi au vélo : une vague d’inventions (fin XIXe-début XXe siècle) », Cahiers François Viète, vol. I, no 6, (lire en ligne).
Notes
[modifier | modifier le code]- Pierre Michaux est le premier fabricant connu de vélocipèdes en série mais le seul témoignage de son fils Henry ne permet pas de lui attribuer avec certitude la paternité de l’invention de l'adaptation de la pédale sur la roue avant, revendiquée notamment par Pierre Lallement ou par l'inventeur bordelais Jean Lacou qui aurait construit en 1846 un vélocipède à pédales à deux roues. L'invention est également attribuée en Allemagne à Philipp Moritz Fischer au cours de l'année 1853.
Annexes
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Philippe Daryl, La vélocipédie pour tous par un vétéran, Librairies-imprimeries réunies, 1892 lire en ligne sur Gallica
- Jacques Seray, « Naissance de la vélocipédie… et d'une polémique », Cyclisme Magazine 100, 1976, p. 17-21
- Keizo Kobayashi, Histoire du vélocipède de Drais à Michaux (1817—1870). Mythes et réalités, Tokyo, Bicycle Culture Center, 1993.
- Claude Reynaud. Le vélocipède illustré. 2008. Editions : musée vélo de Domazan.
- Geoffrey Ratouis (préf. Laurent Beauvallet), Cholet XXe siècle : Chroniques d'un siècle en pays Choletais, Maulévrier, Le Pays Choletais, Hérault, , 222 p. (ISBN 2-7407-0189-6),. .