Gouvernement Ratas II
Présidente de la République |
Kersti Kaljulaid |
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Premier ministre | Jüri Ratas |
Élection | 3 mars 2019 |
Législature | XIVe |
Formation | |
Fin | |
Durée | 1 an, 8 mois et 28 jours |
Coalition | EK-EKRE-IRL |
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Parlement |
57 / 101 |
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Le gouvernement Ratas II est le gouvernement de la république d'Estonie entre le et le , durant la XIVe législature du Riigikogu.
Coalition et historique
[modifier | modifier le code]Formation
[modifier | modifier le code]Dirigé par le Premier ministre sortant, le centriste Jüri Ratas, ce gouvernement est constitué et soutenu par une coalition entre le Parti du centre d'Estonie (EK), le Parti populaire conservateur (EKRE) et l'Union pour la patrie et Res Publica (IRL)[1],[2]. Ensemble, ils disposent de 57 députés sur 101, soit 57,5 % des sièges du Riigikogu[3].
Préalablement à leur nomination, la présidente estonienne, Kersti Kaljulaid, demande à rencontrer individuellement chaque candidat, une procédure inédite[4].
Le , l'opposition parlementaire lance une motion de défiance à l'égard du gouvernement, mais échoue à obtenir les 51 voix nécessaires pour démettre le gouvernement. La coalition reste donc en place[5].
Controverses
[modifier | modifier le code]Liberté de la presse
[modifier | modifier le code]La formation du nouveau gouvernement a provoqué un vif débat sur la liberté de la presse. Plusieurs membres d'EKRE, dont Martin Helme, ont publiquement appelé les médias à la modération, voire à l'exclusion de certains journalistes considérés comme partisans[6]. À la suite de la nomination à la tête de Postimees (l'un des principaux journaux du pays) de Peter Helme, neveu du président du parti EKRE et cousin de Martin Helme, la journaliste Vilja Kiisler démissionne[7],[8]. Le , le journaliste et analyste politique Ahto Lobjakas démissionne de la rédaction d'ERR, la compagnie de radio-télévision nationale, arguant qu'il a été forcé de choisir entre la démission et l'auto-censure[9]. Un autre analyste considère cependant qu'il s'agit d'une "rationalisation" de la liberté de la presse plutôt que d'une censure[10].
Lors d'un discours à l'occasion du centenaire du Parlement estonien, la présidente de la République rappelle l'importance constitutionnelle des libertés, dont la liberté de la presse[11]. Lors de la prestation de serment du nouveau gouvernement, le , Kaljulaid porte un sweatshirt floqué des mots "Sõna on vaba", soit "La parole est libre"[12].
Marti Kuusik
[modifier | modifier le code]Au lendemain des élections, le député Marti Kuusik (EKRE) a été arrêté par la police pour excès de vitesse au volant et conduite sous l'emprise d'alcool[13]. Marti Kuusik a admis les faits lors d'une interview, tout en signalant qu'il aurait été plus prudent s'il avait su qu'il serait nommé ministre et en condamnant une telle conduite chez les représentants du gouvernement[13]. Le Premier ministre, Jüri Ratas, déclare toutefois que cela ne le disqualifie pas en tant que candidat à la fonction ministérielle[14].
Le , peu avant la prestation de serment du nouveau gouvernement, Eesti Ekspress publie un article accusant Kuusik de violences conjugales[15]. Celui-ci nie les accusations rapidement[16]. Ratas déclare croire Kuusik et ne l'exclut pas de la coalition[17]. Lors de la prestation de serment, la tradition veut que chaque ministre se tourne vers le président de la République (Kersti Kaljulaid). Cependant, lors de la prestation de serment de Kuusik, Kaljulaid a choisi de s'absenter et Kuusik a donc dû prêter serment devant une chaise vide[18],[19].
Le , Marti Kuusik évoque le fait qu'une enquête à son encontre ait été lancée et démissionne[20]. Il assure que les allégations à son encontre sont infondées et qu'il démissionne pour se concentrer sur sa défense[21]. EKRE affirme avoir mené sa propre enquête et conclu qu'il ne s'agissait que de rumeurs[22]. ERR note toutefois qu'en démissionnant de son poste au gouvernement, Kuusik pourrait retrouver son siège au Riigikogu et jouir à nouveau de l'immunité parlementaire[23].
Le , Kert Kingo (EKRE) est nommée ministre pour le remplacer[24].
La loi estonienne prévoit généralement une indemnité de départ pour les ministres, équivalente à six mois de salaire[25] ; le ministère de l'économie et des communications confirme toutefois le 1er mai que Kuusik ne recevrait pas d'indemnité de départ[26]. Le , il est pourtant annoncé que Kuusik entendait réclamer cette compensation devant la justice[27].
À ce jour, Marti Kuusik est le ministre ayant servi le moins longtemps dans un gouvernement estonien, n'étant resté ministre que durant 30 heures[27].
Sexisme
[modifier | modifier le code]Plusieurs personnalités, dont le président du Parti social-démocrate[28], ont critiqué la faible proportion de femmes présentes dans ce nouveau gouvernement (2 femmes pour 15 ministres)[29].
Début , Mart Helme déclare lors d'une conférence de presse du gouvernement que la présidente a agi envers Kuusik de manière irréfléchie, "comme une femme en proie à des émotions violentes"[22],[30]. Le ministre de l'Administration publique, Jaak Aab (EK), rejette cette déclaration et accuse Helme de dénigrer "non seulement la présidente mais également toutes les femmes"[31].
Racisme
[modifier | modifier le code]Lors de leur prestation de serment, Mart et Martin Helme ont joint le pouce et l'index[19], dans un signe que certains, dont l'ancien président estonien Toomas Hendrik Ilves et l'ancien Premier ministre suédois Carl Bildt, interprètent comme un signe de ralliement aux positions des suprématistes blancs[20]. Martin Helme avait notamment déclaré en 2013 "Si vous êtes noir, rentrez chez vous" ("Kui on must, näita ust")[32].
International
[modifier | modifier le code]Mi-, Martin Helme, ministre des Finances, annonce qu'il s'opposera à une intégration plus poussée dans l'Union européenne, notamment en matière d'union monétaire et de politique d'immigration. Il ne remet cependant pas en cause la participation de l'Estonie à l'Union européenne ou à la zone euro[33].
Fin , la ministre du Commerce extérieur et des Technologies de l'information, Kert Kingo, annonce qu'elle ne s'exprimera qu'en estonien lors d'un déplacement au Canada[34]. Quelques jours plus tard, elle annonce avoir refusé de participer à une réunion du G20, indiquant qu'elle ne voyagerait "qu'en cas d'extrême nécessité". Le Premier ministre, Jüri Ratas, décide de la remplacer à cette réunion[35]. Cette situation a été largement critiquée par la société estonienne, y compris un député[36],[37],[34].
Succession
[modifier | modifier le code]Ratas annonce sa démission le , alors que le Parti du centre est impliqué dans des soupçons de corruption liés à son financement et à des prêts d’État accordés en retour[38]. Kaja Kallas lui succède[39].
Composition
[modifier | modifier le code]- Les nouveaux ministres sont indiqués en gras, ceux ayant changé d'attributions en italique[40].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (en) « Estonia: Far right set to enter government for first time », sur Deutsche Welle, (consulté le )
- (en) « Riigikogu backs Centre-EKRE-Isamaa coalition, Ratas to remain PM », sur err.ee, (consulté le )
- (en) « Seating plan », sur Riigikogu (consulté le )
- (en) « Gallery: President starts meeting with incoming ministers », sur err.ee, (consulté le )
- (en) ERR News | ERR, « Vote of no-confidence against Ratas fails », sur ERR, (consulté le )
- (et) « Martin Helme nõuab ERR-ilt EKRE suhtes kriitiliste ajakirjanike karistamist ja eetrist mahavõtmist », sur delfi.ee, (consulté le )
- (et) « Postimehe peatoimetajaks saab Peeter Helme », sur delfi.ee, (consulté le )
- (et) « Ajakirjanik Vilja Kiisler lahkub Postimehest erimeelsuste tõttu peatoimetajaga », sur delfi.ee, (consulté le )
- (en) « Journalist: I was given a choice between self-censorship and leaving », sur Postimees, (consulté le )
- (en) « Opinion: Press freedoms in Estonia being rationalized, not attacked », sur err.ee, (consulté le )
- (en) « With rights come responsibilities, President tells Riigikogu », (consulté le )
- (en) « President attends Riigikogu oath ceremony wearing 'speech is free' slogan », sur err.ee, (consulté le )
- (en) « Incoming IT minister caught driving both speeding and with trace alcohol », sur err.ee, (consulté le )
- (et) « Ratas ei nõua EKRE-lt Kuusiku väljavahetamist », sur err.ee, (consulté le )
- (et) « Marti Kuusiku suur saladus: peretuttavad räägivad, et uus minister on väga vägivaldne ja on kahel korral purustanud oma naise käeluu », sur Eesti Ekspress, (consulté le )
- (et) « VIDEO | Peaminister kahtlustas minister Marti Kuusikut lähisuhtevägivallas. Kas Kuusik murdis oma naise käeluu? Mees eitab kõike », sur Delfi, (consulté le )
- (et) « Ratas: ma ei ole nõudnud Kuusiku väljavahetamist », sur err.ee, (consulté le )
- (et) « VIDEO | President Kaljulaid lahkus Marti Kuusiku ametivande andmise ajal saalist », sur Delfi, (consulté le )
- (en) « Gallery: Jüri Ratas cabinet takes oath of office », sur err.ee, (consulté le )
- (en) « Estonia's far-right ministers face rocky start with first resignation », sur BBC, (consulté le )
- (en) « Estonia Ministers’ Gesture Raises Fears of Support for White Supremacy », sur NY Times, (consulté le )
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- (en) « Kuusik resigns from minister role in wake of domestic violence allegations », sur ERR, (consulté le )
- (en) « Gallery: Kert Kingo new IT minister », sur ERR, (consulté le )
- (en) « Government of the Republic Act », sur Riigiteataja (consulté le )
- (en) « Ministry: Kuusik not to receive compensation for leaving office », sur ERR, (consulté le )
- (en) « EKRE ex-minister Marti Kuusik charged with physical abuse », sur ERR, (consulté le )
- (et) « Ossinovski hinnangul ei väärtusta loodav valitsus naiste rolli », sur err.ee, (consulté le )
- (et) « Võimuliidu ettekujutuses kõlbavad valitsema paremini mehed », (consulté le )
- (en) « Estonia minister calls first female president 'emotionally heated woman' », sur The Guardian, (consulté le )
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- (en) « Conservative Politician: If You're Black, Go Back », sur err.ee, (consulté le )
- (en) « Estonian finance minister vows to oppose further EU integration », sur Baltic Times, (consulté le )
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- (en) « PM to stand in for stay-at-home IT minister at upcoming G20 meeting », sur ERR, (consulté le )
- (et) « Kert Kingo sai väliskomisjoni käest põhjuseta puudumise eest noomida », sur Delfi, (consulté le )
- (en) « MP: With new EKRE minister, lack of English language skills a good thing », sur ERR, (consulté le )
- (en-GB) Silver Tambur, « A political crisis in Estonia: Prime minister Jüri Ratas resigns », sur Estonian World, (consulté le )
- « Estonie : Kaja Kallas (centre-droit) devient première femme cheffe du gouvernement », sur RTBF Info, (consulté le ).
- (en) « Government members », sur Valitsus (consulté le )