[go: up one dir, main page]

Aller au contenu

Page:NRF 14.djvu/896

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

890 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Lancre, Henri Boguet, Delrio, le Loyer, Theureux auteur des Spectres et de la Néphélococugie, le célèbre Bodin et ce vieux sournois de Jean Wier se mon- trèrent, par la publicité de leurs œuvres, les organisa- teurs les plus pointilleux de nos cérémonies. Les cours de justice donnaient au sabbat un relief singulier et per- mettaient aux imaginations modestes de le considérer dans ses moindres détails. Nos clients arrivaient ici tout préparés. Ils savaient mieux que nous ce qu'il fallait faire. Et les filles n'étant point bégueules, les choses allaient rondement. Aujourd'hui, monsieur, on fait tour- ner des tables. Ce sport ne permet à la perversité de ses adeptes que des gestes mesurés. Toute l'époque est là. Une époque terriblement malsaine, et qui diffère du dix-huitième siècle en ce sens que les jolies femmes ingèrent dans les « thé » à la mode des pintes d'eau chaude par la bouche, au lieu qu'en d'autres temps plus décoratifs elles employaient une canule et la complaisance d'une soubrette afin d'absorber une semblable quantité de liquide. Quand on a vu ce que j'ai vu, monsieur, il est difficile de considérer le temps où nous agissons avec indulgence. Le sabbat se meurt. Dans quelques années nous ne serons plus que deux autour du Maître. Notre voix sonne faux et nous perdons chaque nuit un peu plus confiance.

— C'est vrai, dit le nègre, qui jusqu'alors s'était contenté d'approuver son ami en hochant la tête.

J'essayai par politesse d'apporter par mes propos un peu d'espoir à ces misérables. La besogne n'était pas facile et tout en parlant je sentais l'inutilité de mes rai- sonnements.

�� �