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L'idée de sympathie est celle de participation, lien, concordance, communication. D'où différents sens, selon qu'on parle de la sympathie entre choses ou de la sympathie entre personnes. Comme le marque le Larousse : « Sympathie. 1) Faculté de participer aux peines et aux joies des autres. 2) Sentiment instinctif d'attraction à l'égard de quelqu'un. 3) Rapport de concordance de certaines choses entre elles ». Sympathie psychologique, sympathie morale et sociale, sympathie universelle (cosmique).

Nature et formes de la sympathie, du philosophe allemand Max Scheler (1923).

Le mot est dérivé de la langue grecque συμπάθεια (sumpatheia)[1], du grec ancien σύν (sýn) qui signifie ensemble et de πάθος (pathos) passion, en l'occurrence la souffrance (de πάσχω - pascho, « être affecté par, à souffrir »), d'où le sens originel de « compassion » ou « condoléance » que le mot a encore de nos jours en anglais par exemple.

La sympathie universelle : conception relevant du stoïcisme

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La sympathie universelle concerne les choses, elle suppose une concordance entre diverses réalités physiques. Chez les stoïciens[2], le monde est pénétré partout d'un même Feu-Logos qui en est le principe de cohésion, de mouvement, de vie. C'est un grand Vivant, de sorte que les parties du monde communient dans un même sentiment et un même souffle. Ce qui affecte une partie affecte les autres : sym-pathie. Mais les anciens stoïciens (Zénon de Cition, Chrysippe de Soles) ne parlent que des relations entre les choses du ciel (ourania) et les choses de la terre (epigeia) :

« À supposer que la nature forme un Tout bien lié et cohérent… que tout l'univers soit un… que tout se tienne dans la nature universelle, de fait, les Stoïciens en donnent plus d'un exemple… Si l'on touche les cordes d'une lyre, les autres cordes résonnent ; les huîtres et les autres coquillages croissent et décroissent avec la Lune… Le flux et le reflux de la mer sont commandés par les phases de la Lune. »

— Cicéron, De divinatione, II, 14, § 33-34)

Posidonios d'Apamée (131-51 av. J.-C.), qui relève du moyen-stoïcisme, étend la sympathie au rapport entre les choses terrestres:

« Et que dire de cet accord de l'univers qui communie dans un même sentiment, dans un même souffle, dans une même continuité entre toutes ses parties ? Cela ne force-t-il pas à approuver ce que j'avance ? La terre pourrait-elle tour à tour se couvrir de fleurs et se dessécher ? Pourrait-on, alors que tant de choses se transforment, reconnaître comment le Soleil se rapproche puis s'éloigne aux solstices d'été et d'hiver ?… Tout cela ne pourrait arriver avec une telle concordance dans toutes les parties du monde, si un même Souffle divin ne les unissait toutes et ne les maintenait ensemble. »

— Cicéron, De Natura Deorum, II, 7, § 19)

Pour Plotin (205 - 270 apr. J.-C.), la sympathie est « comme une unique corde tendue qui, touchée à un bout, transmet le mouvement à l'autre bout »[3]. Le mot grec « sympathie » pouvait également s'appliquer, par animisme, à des correspondances entre objets inanimés et/ou des êtres vivants, comme chez l’occultiste Bolos de Mendès (IIe siècle av. J.-C.). Cicéron parle de l'antipathie entre la vigne et les choux[4]. À la Renaissance, de nombreux auteurs parlent des sympathies et antipathies : Paracelse, Cardan, Tommaso Campanella, Giambattista della Porta, etc.

La sympathie morale et sociale

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Hume édifie sa théorie du jugement moral autour de la sympathie, définie comme notre propension à recevoir « les inclinations et les sentiments des autres »[5]. « Si étroite et si intime est la correspondance des âmes humaines qu'une personne ne m'a pas plus tôt approché qu'elle répand sur moi toutes ses opinions et qu'elle tire à elle mon jugement à un plus ou moins haut degré » ; ensuite, la sympathie désigne le désir de vivre en communauté avec les autres hommes ; ensuite, la sympathie c'est faire comme si j'éprouvais des sentiments que je n'éprouve pas, me mettre fictivement à la place d'autrui, parce que j'imagine que je devrais être à cette place. Adam Smith, ami de Hume, tient la sympathie (sympathy) pour la « faculté de partager les passions des autres »[6]. Il fait de la sympathie le mobile premier des actes et le fondement des jugements moraux. Pour Max Scheler, la sympathie (Mitgefühl) est un acte intentionnel de communication entre personnes[7].

La sympathie psychologique

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Le mot "sympathie" peut également signifier être touché par des sentiments ou des émotions. Ainsi, l'essence de la sympathie est la préoccupation forte qu'on ressent pour autrui. La sympathie existe lorsque les sentiments ou émotions d'une personne sont profondément compris et appréciés par une autre personne. L'état psychologique de la sympathie est étroitement lié à celui de la compassion, de l'empathie et de préoccupation empathique. Bien que l'empathie et la sympathie soient souvent utilisés indifféremment, une variation subtile dans l'usage courant peut être détectée. Faire preuve d'empathie, c'est répondre à l'état émotionnel d'un autre en renvoyant des sentiments d'un genre similaire[8]. La sympathie comprend non seulement l'empathie (mais pas toujours car l'erreur de jugement sur l'émotion de l'autre est aussi possible), mais implique aussi d'avoir un regard positif ou une préoccupation non éphémère pour l'autre personne[9].

Dans l'usage courant, la sympathie est prise généralement comme la compréhension qu'on a d'un autre, de son malheur ou de sa souffrance, son chagrin.

La sympathie peut également se référer à être conscient des émotions positives éprouvées par les autres.

Dans un sens plus large, il peut se référer à l'appartenance à une idéologie particulière, par exemple politique. On parle alors d'une personne sympathisante.

Différence entre l'empathie et la sympathie aide à les définir.[pas clair]

De façon pratique l'empathie est de se mettre dans un mode "mise en compréhension" du sentiment d'autrui tandis que la sympathie est de se mettre à la place de l'autre. Dans le deuxième cas, la compréhension est jumelée à un investissement de soi. Par le fait de l'imagination, voir « Théorie des sentiments moraux, Adam Smith » la personne s'imagine et tente de ressentir ce que l'autre ressent, il souffre ou jouit avec lui, d'où l'investissement. La différence est énorme lorsqu'on accompagne quelqu'un dans la mort.

La sympathie physiologique

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La sympathie physiologique est une espèce de contagion par laquelle quelqu'un reproduit par imitation ou influence les comportements d'un autre. Ainsi du bâillement, du rire.

« Chez l'homme, rire et bailler par imitation, marcher au pas, reproduire les mouvements d'un funambule qu'on regarde… sont des cas de sympathie physiologique »

— Théodule Ribot, Psychologie des sentiments, II, chap. 4 : "La sympathie et l'émotion tendre".

Voir aussi

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Bibliographies

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Bibliographie sur la sympathie universelle

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  • Reinhardt, Poseidonios, 1921
  • Reinhardt, Kosmos und Sympathie, 1931.
  • A.-J. Festugière, La Révélation d’Hermès Trismégiste, Paris, Les Belles Lettres, 1944-1954 (4 volumes) : vol. I : L'astrologie et les sciences occultes, 441 p. ; vol. II : Le dieu cosmique, 610 p. ; vol. III : Les doctrines de l'âme, 314 p. ; vol. IV : Le dieu inconnu, 319 p. Réimpr. en 1 vol., Paris, Les Belles Lettres, 2006, 1700 p.
  • Émile Bréhier, Chrysippe et l'ancien Stoïcisme, PUF, 1910, éd. revue 1951.

Bibliographie sur la sympathie morale et sociale

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  • David Hume, Traité de la nature humaine (1739-1740)
  • Adam Smith, La théorie des sentiments moraux (1759), trad. marquise de Condorcet (1798), Aujourd'hui
  • Max Scheler, Nature et Formes de la sympathie. Contribution à l'étude des lois de la vie affective (1923), Payot, 1971.
  • Monique Canto-Sperber, Dictionnaire d'éthique et de philosophie morale (1996), PUF, t. II, p. 1904-1910.

Bibliographie sur la sympathie psychologique

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  • Decety, J. and Ickes, W. (Eds.) (2009). The Social Neuroscience of Empathy. Cambridge: MIT Press, Cambridge.
  • Decety, J. and Batson, C.D. (Eds.). Interpersonal Sensitivity: Entering Others' Worlds. Hove: Psychology Press.
  • Eisenberg, N., & Strayer, J. (1987). Empathy and its Development. Cambridge: Cambridge University Press.
  • Lamm, C., Batson, C.D., & Decety, J. (2007). "The neural substrate of human empathy: effects of perspective-taking and cognitive appraisal". Journal of Cognitive Neuroscience, 19, 42-58.

Liens externes

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Notes et références

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  1. 3Atext%%% 3A1999.04.0057 3Aentry% 3D% 2398480 sympatheia, Henry George Liddell, Robert Scott, Un grec-anglais Lexique, à Persée
  2. A.-J. Festugière, La Révélation d'Hermès Trismégiste, t. II : Le Dieu cosmique, 1949, p. 418-419.
  3. IV, 4, 41
  4. De Natura Deorum, II, 47, § 120
  5. Traité de la nature humaine, 1739-1740 (II, 1, 11)
  6. Théorie des sentiments moraux, 1759 ; I, 1, 3
  7. Nature et Formes de la sympathie (1923, trad., Payot, 1951)
  8. Chismar, D. (1988). L'empathie et la sympathie: la différence est importante. The Journal of Value Inquiry, 22, 257-266.
  9. Decety, J., & Batson, CD (2007). Neuroscience sociale des approches de la sensibilité aux relations interpersonnelles. Social Neuroscience, 2 (3-4), 151-157
  10. Serge Aron, « L’ordre de la Sympathie, une résonance dans le Temps; 1ère partie: Psychiatrie montaignienne et Sympathie freudienne, avec Jean-Pierre Cléro, Carlo Rovelli, Michel de Montaigne et Sigmund Freud... », sur Actualité des maux croisés, pérégrinations ad libitum d'un psychiatre des sympathies, des perplexités paradoxales & des hégémonies culturelles... (consulté le )
  11. Serge Aron, « Ordre clair-obscur de la Sympathie et énigme œdipienne du Temps; 2ème partie: Mirage de la sympathie et énigme du temps, avec Jean-Pierre Cléro, Carlo Rovelli, Georg Wilhelm Friedrich Hegel, Epicure et Giordano Bruno... », sur Actualité des maux croisés, pérégrinations ad libitum d'un psychiatre des sympathies, des perplexités paradoxales & des hégémonies culturelles... (consulté le )
  12. Serge Aron, « Ordre narcissique de la Sympathie et énigme œdipienne du Temps; 3ème partie: Une sympathie entre médecine et morale, depuis Hippocrate, Démocrite et les Abdéritains jusqu’à Hume, Lacan et les Lacaniens; avec Jean-Pierre Cléro, Patrick Dandrey, Jean-Baptiste Poquelin alias Molière, Adam Smith, David Hume, Jean-Jacques Rousseau, Lou Andreas-Salomé, Emmanuel Carrère, Jeremy Bentham et Jacques Lacan… », sur Actualité des maux croisés, pérégrinations ad libitum d'un psychiatre des sympathies, des perplexités paradoxales & des hégémonies culturelles... (consulté le )
  13. Serge Aron, « Ethique de la Sympathie & Esprit du Temps; 4ème partie: Le temps, un ordre écrit à l’encre sympathique, avec Carlo Rovelli, Jean-Pierre Cléro et Cédric Villani, illustrés par les maîtres enchanteurs Dominique A le dominicain & Philippe Katerine l'augustinien... », sur Actualité des maux croisés, pérégrinations ad libitum d'un psychiatre des sympathies, des perplexités paradoxales & des hégémonies culturelles... (consulté le )
  14. Serge Aron, « Prendre le Temps de la Sympathie en Psychiatrie; 5ème partie: entre durée bergsonienne & réminiscence proustienne, à la recherche d'une sympathie perdue; avec Jean-Marie Guyau, Théodule Ribot, Henri Bergson, Marcel Proust, Albert Einstein, Elie During, Etienne Klein, Paul Audi, Michel de Montaigne, Blaise Pascal, Jacques Lacan, Michel Onfray le polémiste & Greta Thunberg la phénoménale... », sur Actualité des maux croisés, pérégrinations ad libitum d'un psychiatre des sympathies, des perplexités paradoxales & des hégémonies culturelles... (consulté le )
  15. Serge Aron, « Les confins moraux et éthiques de la sympathie; 6e partie: de l'empathie à la sympathie, entre subjectivité cognitive & objectivité émotionnelle, avec Theodor Lipps, Edmund Husserl, Max Scheler, Edith Stein, Paul Ricœur & Emmanuel Levinas, mais aussi Martin Heidegger, Natalie Depraz, Emmanuel Kant, Farid ad-Din Attar, Majnûn & Laylâ, Ghazâlî & Averroès, Paul Audi… », sur Actualité des maux croisés, pérégrinations ad libitum d'un psychiatre des sympathies, des perplexités paradoxales & des hégémonies culturelles... (consulté le )
  16. Serge Aron, « Odyssée en sympathie parmi les cours momentanés de valeurs intemporelles; 7e partie: éloge de la sympathie, avec Érasme de Rotterdam & Thomas More, Max Scheler, Hans Asperger et Edith Sheffer, Natalie Depraz, Jean-Pierre Cléro & David Hume, Claude Romano, Hartmut Rosa, et sainte Patti Smith enchantant le rêve d'une conversion constantinienne en devenir... », sur Actualité des maux croisés, pérégrinations ad libitum d'un psychiatre des sympathies, des perplexités paradoxales & des hégémonies culturelles... (consulté le )