Bryson (néopythagoricien)
Bryson (en grec Βρύσων), philosophe de l'école pythagoricienne, est l'auteur supposé d'un traité antique d'économie domestique (Économique, en grec Οἰκονομικός).
La version grecque originale de ce texte est presque perdue : il en reste deux courts fragments dans le Florilège de Jean Stobée (livre IV), dans une série de pseudépigraphes sur le thème de l'œconomia rédigés en dialecte dorien et attribués à des pythagoriciens[1].
Si l'original grec du texte est à peu près perdu, des versions arabe et hébraïque en ont été mises au jour à la fin du XIXe siècle. D'une part, Moritz Steinschneider a révélé la présence dans un manuscrit hébreu de la bibliothèque d'État de Munich de la traduction depuis l'arabe, effectuée par un Juif de Séville ayant vécu au XIVe siècle du nom de David bar Salomon b. Ya'ish, d'un traité attribué à un auteur nommé Brāsōn[2]. Côté arabe, Ibrahim al-Yazigi publia dans sa revue culturelle Aḍ-Ḍiya'[3] les deux premières parties (sur l'argent, sur les esclaves) de la version arabe du traité, sans connaître l'identité de l'auteur. D'autre part, au 11e congrès des orientalistes tenu à Paris en 1897, Louis Cheikho décrivit un précieux manuscrit alors en la possession d'un avocat renommé de Beyrouth[4] ; il contenait le texte entier, que le jésuite publia quelque temps plus tard dans sa revue Al-Machriq[5].
L'influence de ce petit traité dans la littérature arabe médiévale se repère particulièrement dans trois ouvrages : d'une part dans le Tahdhīb al-akhlāq de Miskawayh (qui paraphrase sa quatrième partie consacrée à l'éducation des enfants) ; d'autre part dans un texte du genre « miroir des princes », Sulūk al-malik fi-tadbīr al-mamalik (Conduite du roi dans le gouvernement des royaumes), d'un auteur du XIIIe siècle nommé Shihāb al-Dīn Ahmad b. Muhammad b. Abī l-Rabī'[6], qui en fait des citations littérales ; enfin dans un fameux traité consacré au commerce, le Kibāb al-ishāra ila mahāsin at-tijara (Livre de la connaissance des vertus du commerce), d'un auteur d'époque incertaine[7] appelé Ja'far ibn 'Ali al-Dimashqi, qui cite aussi littéralement le texte de Bryson[8].
Il existe une troisième version médiévale conservée du texte (que Martin Plessner reproduit avec les deux autres dans son édition) : la traduction latine de l'arabe réalisée vers 1300 par le médecin montpelliérain Armengaud Blaise (sous le titre erroné Œconomica Galieni).
Bibliographie
modifier- Maurice Bouyges, « Notes sur des traductions arabes d'auteurs grecs. I. L'Économique de Bryson (?). II. L' Économique pseudo-aristotélicienne. III. Épître de Thémistius à Julien sur la politique », Archives de philosophie 2, cahier 3, 1925, p. 1-23.
- Martin Plessner, Der Οἰκονομικὸς des Neupythagoreers Bryson und sein Einfluß auf die Islamische Wissenschaft. Edition und Übersetzung der erhaltenen Versionen, nebst einer Geschichte der Œkonomik im Islam mit Quellenprobe in Text und Übersetzung, coll. Orient und Antike 5, Heidelberg, Carl Winter, 1928.
- Holger Thesleff, The Pythagorean Texts of the Hellenistic Period, coll. Acta Academiæ Aboensis (Ser. A, « Humaniora », 30.1), Turku (Åbo), 1965.
- Bryson et Ibn Sinâ (trad. de l'arabe par Youssef Seddik, préf. Yassine Essid), Penser l'économique, Tunis, MediaCom, , 95 p. (BNF 40979311)
- Fuat Sezgin, Democritus, Theophrastus, Zenon, Bryson (?), Porphyrius, Themistius and Johannes Philoponus in the Arabic Tradition. Textes and Studies Collected and Reprinted by Fuat Sezgin, Islamic Philosophy, vol. 110, Publications of the Institute for the History of Arabic-Islamic Science, Francfort-sur-le-Main, 2000.
Notes et références
modifier- Friedrich Wilhelm, « Die Œconomica der Neupythagoreer Bryson, Kallikratidas, Peroktione, Phyntis », Rheinisches Museum für Philologie 70, 1915, p. 161-223.
- Moritz Steinschneider, Die hebräischen Handschriften der königlichen Hof- und Staatsbibliothek in München, Munich, 1875 (manuscrit n° 263, texte 3), et Die hebräischen Übersetzungen des Mittelalters und die Juden als Dolmetscher, Berlin, 1893.
- Aḍ-Ḍiya', vol. II, 1899-1900.
- Ce manuscrit, qui date du XIVe siècle, contient un majmū'a (recueil) de vingt traités philosophiques ou éthiques (la moitié par extraits), entre autres un traité de Galien (Sur les types de caractères) perdu en grec, une lettre de Thémistios à l'empereur Julien, le traité Réforme de la morale de Yahya ibn Adi, etc. Il fut peu après acquis par l'érudit égyptien Ahmad Taymur (1871-1930), propriétaire à sa mort d'une collection d'environ 4 000 manuscrits et imprimés qu'il légua à la Bibliothèque nationale d'Égypte (Dar al-Kutub). Un autre manuscrit plus ancien (XIIe – XIIIe siècle), signalé en 1971 par Fuat Sezgin et conservé aujourd'hui dans la bibliothèque de la mosquée al-Azhar, contient le même texte.
- « Kitāb tadbīr al-manzil », Al-Machriq, vol. XIX, 1921, p. 161-181.
- Le texte est dédié à al-Musta'sim, dernier calife abbasside de Bagdad (1242-1258).
- Le plus ancien manuscrit conservé du texte porte la date de 1175.
- Parmi les autres auteurs chez qui apparaît l'influence du traité de Bryson, on cite aussi Avicenne, Nasir ad-Din at-Tusi, Jalal ad-Din ad-Dawani (Hamadi Redissi, Les Politiques en Islam. Le prophète, le roi et le savant, Paris, L'Harmattan, 2000, p. 54).