Bohemian Club
Le Bohemian Club, créé en 1872 par des journalistes du San Francisco Chronicle et situé à San Francisco en Californie, est l'un des clubs politiques américains les plus fermés du monde. Très conservateur et regroupant l'élite et des personnes d'influence, il compte quelque 2 000 membres (uniquement des hommes, pour la plupart des Américains, mais également quelques Européens et Asiatiques) qui se réunissent tous les ans lors des dernières semaines du mois de juillet au Bohemian Grove.
Fondation |
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Site web |
(en) www.bohemianclub.com |
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Ce club est régulièrement l'objet ou au centre de théories du complot.
Histoire
modifierCe gentlemen's club (appelé en anglais private club) est fondé en , originellement par des journalistes, dont Tommy Newcombe, Sutherland, Dan O'Connell, Harry Dam, tous employés au San Francisco Chronicle, comme en témoigne en 1915 Michael Henry de Young (en), propriétaire du journal[1]. Ils souhaitaient seulement avoir un endroit où terminer la journée ou le week-end pour s'y détendre. Progressivement, les journalistes invitèrent des artistes et des musiciens. Au départ, ils se donnèrent comme modèle la « bohème », ou plutôt ce qu'ils imaginaient être ce mode de vie né en Europe quelques dizaines d'années plus tôt. Le bohemianism était en vogue en Amérique parmi une certaine élite intellectuelle. En 1882, Oscar Wilde, lors de sa tournée américaine, rend visite au Bohemian Club et déclare : « Je n'ai jamais vu autant de bohèmes si bien habillés, bien nourris, et si entrepreneurs de toute ma vie[2] ». Toutefois, les beaux-arts et la littérature semblent avoir été au cœur de leurs moments de détente.
A l'époque contemporaine il s'agit toujours d'un club exclusivement masculin. Avec les années, le recrutement et la cooptation des membres s'élargit à des hommes d'affaires.
Sa devise est : « Weaving spiders come not here » (« Araignées qui tissez, ne venez pas ici »), vers extrait de la scène 2 du deuxième acte du Songe d'une nuit d'été de William Shakespeare, que l'on doit entendre comme un interdit signalé aux membres, celui de ne pas aborder au sein de la confrérie les sujets relatifs aux affaires, aux réseaux d'intérêts, aux combines[réf. nécessaire]. Le club est donc un lieu de détente, du moins était-il conçu ainsi au départ.
La cotisation annuelle est, en 2015, de 25 000 dollars et la liste d'attente serait d'une vingtaine d'années. Le club dispose d'un siège à San Francisco même, dans un immeuble de six étages en briques, situé à l'angle de Post Street et de Taylor Street, à deux blocs à l'ouest d'Union Square. Il est voisin de l'Olympic Club (en) et du Marines Memorial Club (en). Le siège dispose de salles à manger et de réunions, d'un bar, d'une bibliothèque, d'une galerie d'art, d'un théâtre et de chambres d'hôtes.
En 1878, le club acquiert une vaste propriété privée de 11 km2, située à Monte Rio en Californie et qui prend le nom de Bohemian Grove. Les membres du club s'y réunissent chaque année, lors des trois dernières semaines de juillet. En dehors de cette période, les membres sont autorisés à venir séjourner avec leurs épouses et enfants durant de courtes périodes de temps. D'une manière générale, chaque membre peut inviter un ami ou un proche.
En 1881, l'un des membres, le journaliste et poète James F. Bowman (en) a l'idée d'organiser à Bohemian Grove une cérémonie inaugurale qu'il baptise Cremation of Care : d'inspiration païenne, il s'agissait de symboliquement brûler en effigie les désagréments accumulés durant une année de labeur. Au fil des années, d'autres manifestations sont élaborées : chaque membre peut proposer différents spectacles, par exemple des pièces de théâtre de leur composition, des récitals musicaux, poétiques, etc. Il existe même une journée dédiée au défoulement verbal, qui s'inscrit dans la lignée des ribalderies ancestrales (grivoiseries).
Le club comptait en 2022 plus de 2 500 membres, parmi lesquels des hommes politiques, des banquiers, des hommes d'affaires et plusieurs anciens présidents[3]. Il est considéré au moins depuis les années 1950 comme très conservateur[4].
Le « complotisme » dans les médias
modifierAu début des années 1970, le sociologue G. William Domhoff estime que le Bohemian Club fait partie d'une culture de cohésion de la classe sociale dominante américaine[5]. Il lui dénie toute intention complotiste, expliquant que ce club n'est là que pour le délassement des élites et leur cohésion[6].
En 2000, le complotiste d’extrême droite Alex Jones s'introduit dans le club pour y filmer une partie de son documentaire Dark Secrets inside Bohemian Grove, intitulée « Le Bûcher des Soucis » - Jones pensant que les membres du club se livrent en fait à des rituels occultes répréhensibles[7].
Le , à Minneapolis, Bill Clinton est abordé durant un discours par un inconnu prétendant que les attentats du sont une imposture, en accusant le Bohemian Club. Clinton rejette immédiatement l'idée que le soit une imposture et ajoute sarcastiquement : « Avez-vous dit le Bohemian Club ? C'est là que tous ces riches républicains vont et posent nus devant des arbres, n'est-ce pas ? Je ne suis jamais allé au Bohemian Club mais vous devriez. Cela vous ferait du bien, vous y prendriez du bon air »[7].
Le Bohemian Club dans la culture populaire
modifier- Prodigy, dans sa chanson Real Power Is People figurant sur l'album H.N.I.C. Pt. 2 (2008), ferait allusion au club dans le couplet suivant : « It's a secret government that worship an owl / They practice witchcraft to harness they power[8]. »
- Dans la série télévisée House of Cards, l'épisode 8 de la saison 5 diffusé en 2017 débute par un week-end de retraite en forêt entre chefs d'entreprises et personnalités politiques masculines, allusion au séminaire estival du Bohemian Club[9].
Notes et références
modifier- (en) M. H. de Young, In: Varied Types par Edward F. O'Day, San Francisco, Town Talk Press, 1915, p. 71 — sur Archive.org.
- (en) I never saw so many well-dressed, well-fed, business-looking Bohemians in my life, In: « Keeping Reality at Bay » par Maria Finn, The Wall Street Journal du 9 octobre 2010
- (en) « the Bohemian Club | Britannica », sur www.britannica.com (consulté le )
- Bernard Sionneau, « Réseaux conservateurs et nouvelle doctrine américaine de sécurité », Annuaire français de relations internationales, vol. IV, , p. 501 (note 5) (lire en ligne [PDF])
- (en) G. William Domhoff, Bohemian Grove and Other Retreats : A Study in Ruling-Class Cohesiveness, Harper & Row, (lire en ligne [PDF])
- G. William Domhoff, « Social Cohesion & the Bohemian Grove : The Power Elite at Summer Camp », sur Who Rules America ?, (consulté le )
- Camille Hamet, « Au cœur du club secret qui réunit les hommes les plus puissants de la planète », sur Ulyces, (consulté le )
- « Prodigy turning heads with "Real Power Is People" », sur yardflex.com via Internet Archive (consulté le ).
- « Le Bohemian Club, la société secrète qui a inspiré les scénaristes de «House of Cards» », Slate.fr, (lire en ligne, consulté le )
Voir aussi
modifierBibliographie
modifier- G. William Domhoff, Bohemian Grove and Other Retreats: A Study in Ruling-Class Cohesiveness, essai de sociologie, New York, Harpercollins College Div, 1er juin 1975 (ISBN 0-0613-1880-9).
- Mike Hanson, Bohemian Grove: Cult Of Conspiracy, essai, iUniverse, septembre 2004, (ISBN 0-5953-2674-9).
- Armand Santilli, The Boys at Bohemian Grove, essai, Xlibris Corporation, décembre 2004, (ISBN 1-4134-5948-X).
Liens externes
modifier- (en) Liste de membres du Bohemian Club (en)
- (en) « Masters of the Universe Go to Camp: Inside the Bohemian Grove » par Philip Weiss, journaliste à Spy Magazine (novembre 1989)