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Jean Filiol

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Jean Filiol
Jean Filiol en 1938[1].
Biographie
Naissance
Décès
Nom dans la langue maternelle
Jean FilliolVoir et modifier les données sur Wikidata
Surnom
Deschamps, Marcel Denis
Nationalité
française
Activités
Autres informations
Membre de

Jean Filiol (parfois orthographié erronément Filliol malgré la graphie de l'acte d'état civil[2]), né le à Bergerac et mort en 1975 à Milan, est un militant nationaliste français, cofondateur avec Eugène Deloncle de la Cagoule en 1935.

De l'Action française à la Cagoule

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Jean Filiol (années 1930).

Militant de l'Action française, où il dirigeait la 17e équipe des Camelots du roi dans le quartier de La Muette[3] dans le 16e arrondissement de Paris, il est très actif durant la manifestation des Ligues, le [4]. De cet événement, naît une opposition farouche entre les dirigeants de l'Action française, lui et son équipe de camelots[5]. Celle-ci débute par une accusation d'immobilisme lancée à l'encontre de Georges Calzant et Maurice Pujo, qui auraient été introuvables pendant l'émeute[5]. Puis, en 1935, dans un long mémoire signé par 97 camelots appuyés par Jean Filiol, une argumentation tend à accuser Calzant, Pujo et Maxime Real del Sarte de laisser dépérir le mouvement[5]. Filiol et ses 97 camelots sont alors exclus de l'Action française[5].

Jean Filiol assurant la sécurité de Charles Maurras le 15 mai 1932 lors de la fête nationale de Jeanne d'Arc et du patriotisme.

Dans ces circonstances, se développe dès le mois de décembre un groupuscule, le Parti national révolutionnaire (PNR ou PNRS) qu'il fonde avec son ami Eugène Deloncle[6]. Ses adhérents ne peuvent échapper à la police. C'est à cette fin qu'ils décident de dissoudre leur association aussi légale soit-elle[6], et de créer une organisation non plus légale mais secrète, l'Organisation secrète d'action révolutionnaire nationale (OSARN). Lors de son démantèlement, cette organisation sera dénommée le « Comité secret d'action révolutionnaire » (CSAR) et surnommée la « Cagoule » dans la presse[6].

Ce groupe d'extrême droite s'oriente alors dans des actions de plus en plus violentes dans le but de renverser le régime républicain. En 1937, Jean Filiol est soupçonné d'avoir assassiné le 23 janvier l'économiste russe Dimitri Navachine et d'avoir participé à l'assassinat des frères Carlo et Nello Rosselli à Bagnoles-de-l'Orne pour le compte de Mussolini, à la suite duquel il se réfugie en Italie puis en Espagne.

Collaborateur avec l'Allemagne nazie

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Jean Filiol en mars 1943.

En 1941, il revient en France et rejoint l'équipe dirigeante du Mouvement social révolutionnaire de Deloncle où il est chargé du renseignement. Le , il organise un « putsch » pour évincer Deloncle. Pierre Laval, échaudé depuis la tentative d'assassinat dont il a été victime de la part de Paul Collette en , voit en lui un assassin en puissance et le fait interner en au camp de Saint-Paul-d'Eyjeaux.

Joseph Darnand, secrétaire d'État au maintien de l'ordre et chef de la Milice, le fait libérer début 1944 et l'affecte à la Franc-garde de la Milice dans le Limousin, en le chargeant encore du renseignement. Il a investi, avec ses camarades, le Petit Séminaire, près de l’Hôtel de ville de Limoges, les tortionnaires opèrent au deuxième étage du bâtiment B, chambre 19[7]. Jean Filiol y torture pendant trois mois des résistants, comme Victor Renaud, et laisse dans la région un souvenir épouvantable. Il sera aussi en liaison étroite avec les services allemands de la SD (qui à cette époque sont dirigés par les officiers August Meier et Erich Bartels qui investit une villa à l’angle de l’impasse Tivoli et du cours Gay-Lussac tout près de la Gare de Limoges-Bénédictins. Leur tâche est lourde car la région du Limousin est en grande partie contrôlé par les FTP de Georges Guingouin. Le 27 juin 1944, à Saint-Victurnien, il monte une embuscade contre des résistants à l’issue de laquelle neuf résistants périrent ainsi que deux habitants du village seront tués[8]. Jean Filiol accompagne les Allemands lorsqu’ils descendent pour conduire une grande rafle de suspects dans les rues de Périgueux[8]. Lorsque Jean de Vaugelas, est remplacé à Limoges, par Émile Raybaud, Jean Filiol, qui ne s'entend pas avec ce nouveau chef qu'il juge trop indulgent, obtient le droit de quitter le Limousin pour l'Auvergne. Il aurait été à l'initiative de l'exécution de 24 civils ou résistants extraits de leur cellule de la prison allemande du 92ème RI à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) et fusillés à Orcines (Puy-de-Dôme) par les Allemands le 13 juillet 1944 en représailles du sabotage de 24 poteaux électriques par la Résistance. Il appartenait alors à la Milice. Selon un rapport du commissaire de police de Chamalières au commissaire central de Clermont-Ferrand, en date du 17 août 1944, Filiol aurait à cette date été directeur adjoint du maintien de l'ordre à Clermont-Ferrand sous le nom de Denis. Il rencontre le commandant local Paul Blumenkamp, qui emploie plusieurs agents hauts tel que Ursula Brandt ou encore les français Georges Mathieu, et Jean Vernières. Il serait alors domicilié à Paris Saint-Lazare[9]. Le 9 juin 1944, Jean Filiol participe avec l'état major des SS de la division Das Reich à la préparation du massacre d'Oradour-sur-Glane notamment une réunion préparatoires aux opérations au siège de la milice rue du général Cérez[10]. Le 10 aout 1944, Joseph Darnand transmet un ordre de repli général. Jean Filiol quitte Clermont-Ferrand pour Vichy puis traverse la Bourgogne, arrive à Nancy puis en Allemagne, il retrouve dans le dernier refuge des collaborateurs français, Jean Degans, Max Knipping et Marcel Gombert. Jean Filiol installe son QG à Kraunchenwies près de Sigmaringen, où Pierre Laval, Fernand de Brinon, et Philippe Pétain et sa femme Annie Pétain se sont réfugiés. En compagnie de Jean de Vaugelas, il participe à la création de « maquis blancs » pour reconquérir la France.

Après-guerre

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Après la guerre, Filiol est condamné par contumace à la peine capitale.

Pour l'historien Robert O. Paxton, il est évident qu'il fait partie de ces Français marginaux qui « ont émargé aux fonds secrets de l'Allemagne et de l'Italie à la fin des années 1930[11]. »

Contrairement à ce qui a été longtemps cru, Filiol n'est pas parti en Espagne après la guerre. Comme Marcel Déat ou Hermann Bickler il a fait partie de ces hommes partis s'abriter en Italie. Sous le nom d'Adriano Grossi, il a pu refaire sa vie dans la région de Milan jusqu'à sa mort en 1975[12].

D'après Christine Sautermeister, professeur à l'université de Hambourg, Jean Filiol aurait inspiré le personnage du tueur Horace Restif dans les romans D'un château l'autre et Rigodon de l'écrivain Louis-Ferdinand Céline. L'assassin fictif est également nommé « Palmalade », un pseudonyme utilisé par le tueur de la Cagoule, affirme l'universitaire franco-allemande[13].

Notes et références

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  1. Photographie publiée dans Le Populaire, no 5448, .
  2. Delluc et Delluc 2005, p. 19.
  3. Angelo Tasca, David Bidussa, Denis Peschanski, Annali della Fondazione Giangiacomo Feltrinelli (1995). La France de Vichy. Archives inédits d'Angelo Tasca, Feltrinelli Editore, 1996, 469 p., p. 164, note 61.
  4. Alain Decaux, Fabuleux destins, Perrin, coll. « Collection Tempus », (ISBN 978-2-262-07601-6)
  5. a b c et d Thomas Roman in Agnès Callu, Patricia Gillet, Lettres à Charles Maurras : amitiés politiques, lettres autographes : 1898-1952, Presses univ. Septentrion, 2008, 256 p., p. 160.
  6. a b et c Freigneaux 1992, p. 8.
  7. https://france3-regions.blog.francetvinfo.fr/ici-c-est-limoges/2017/03/22/limoges-pendant-la-seconde-guerre-mondiale-2.html
  8. a et b https://devirisillustribusblog.wordpress.com/2016/09/11/v-filiol-le-milicien/
  9. Lettre du commissaire Le Pabic au commissaire central, 18 août 1944. Copie conservée par le service de renseignement de la Résistance (SR), archives privées, Clermont-Ferrand
  10. https://www.fondationlaposte.org/florilettres/lettres-et-extraits-choisis/extraits-choisis-la-meute-histoire-de-la-gestapo-limoges
  11. La France de Vichy, 1940-1944
  12. « Un historien a retrouvé le nationaliste français assassin des frères Rosselli », sur RetroNews - Le site de presse de la BnF, (consulté le )
  13. Christine Sautermeister, Louis-Ferdinand Céline à Sigmaringen : novembre 1944 - mars 1945 chronique d'un séjour controversé, Paris, éditions Écriture, , 359 p. (ISBN 978-2-35905-095-0, lire en ligne), p. 239-244.

Sources primaires

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Bibliographie

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  • Jean-Marc Berlière et François Le Goarant de Tromelin, Liaisons dangereuses : miliciens, truands, résistants, Paris, 1944, Paris, Perrin, , 377 p. (ISBN 978-2-262-03567-9, présentation en ligne)
  • Christian Bernadac (éd.), Les Carnets secrets de la Cagoule : Dagore, Paris, Éditions France-Empire, , 609 p. (présentation en ligne)
  • Gérard Bourdin, « L'affaire Rosselli et l'Orne : de l'aveuglement à l'oubli », Cahier des Annales de Normandie, no 29 « Les Italiens en Normandie, de l'étranger à l'immigré : Actes du colloque de Cerisy-la-Salle (8-11 octobre 1998) »,‎ , p. 209-224 (lire en ligne).
  • Philippe Bourdrel, La Cagoule : histoire d'une société secrète du Front populaire à la Ve République, Paris, Albin Michel, (1re éd. 1970), 404 p. (ISBN 2-226-06121-5)
  • Philippe Bourdrel, Les Cagoulards dans la guerre, Paris, Albin Michel, , 282 p. (ISBN 978-2-226-19325-4)
  • (en) Gayle K. Brunelle et Annette Finley-Croswhite, Murder in the Métro : Laetitia Toureaux and the Cagoule in 1930s France, Baton Rouge, Louisiana State University Press, , XVII-266 p. (ISBN 978-0-8071-3616-4, présentation en ligne)
  • Brigitte Delluc et Gilles Delluc, Jean Filiol, du Périgord à la Cagoule, de la Milice à Oradour, Périgueux, Pilote 24 édition, , 171 p. (ISBN 2-912347-53-X)
  • Jacques Delperrié de Bayac, Histoire de la milice, 1918-1945, Paris, Fayard, (1re éd. 1969), 698 p. (ISBN 2-213-59288-8)
  • Frédéric Freigneaux (mémoire de maîtrise, Histoire, Toulouse 2), Histoire d'un mouvement terroriste de l'entre-deux-guerres : « la Cagoule », , 435 p.
  • Frédéric Freigneaux, « La Cagoule : enquête sur une conspiration d'extrême droite », L'Histoire, no 159,‎
  • Jean-François Miniac, Les Grandes Affaires criminelles de l'Orne, de Borée, Paris, 2008 (ISBN 978-2-84494-814-4)
  • Jean-Émile Néaumet, Les grandes enquêtes du commissaire Chenevier : de la Cagoule à l'affaire Dominici, Paris, Albin Michel, , 347 p. (ISBN 2-226-07985-8)
  • Marc Parrotin, « Victimes du tortionnaire et assassin Filliol en Limousin (mai-juillet 1944) », Bulletin de la Société historique et archéologique du Périgord, no 2,‎ , p. 381-386
  • Marc Pottier, « Le crime du 9 juin 1937 et l'opinion normande de l'époque : l'émotion d'une ténébreuse affaire », Matériaux pour l'histoire de notre temps, Paris, Association des amis de la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine (BDIC) et du musée, no 57 « Carlo et Nello Rosselli : antifascisme et démocratie »,‎ , p. 36-41 (lire en ligne)
  • Nicolas Violle, « La réception de l'assassinat des frères Rosselli dans la presse populaire parisienne », Matériaux pour l'histoire de notre temps, Paris, Association des amis de la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine (BDIC) et du musée, no 57 « Carlo et Nello Rosselli : antifascisme et démocratie »,‎ , p. 42-49 (lire en ligne)
  • Éric Vial, « Carlo Rosselli et la situation de l'antifascisme italien à la veille de sa mort », Matériaux pour l'histoire de notre temps, Paris, Association des amis de la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine (BDIC) et du musée, no 57 « Carlo et Nello Rosselli : antifascisme et démocratie »,‎ , p. 50-54 (lire en ligne)
  • Jean-Raymond Tournoux, Secrets d'État, Dien Bien Phu, les paras, l'Algérie, l'affaire Ben Bella, Suez, la cagoule, le 13 mai, de Gaulle au pouvoir, Paris, Plon, , II-499 p.
  • Jean-Raymond Tournoux, L'Histoire secrète : la Cagoule, le Front populaire, Vichy, Londres, 2e Bureau, l'Algérie française, l'O.A.S., Paris, Plon, , 384 p.
  • Éric Vial, La Cagoule a encore frappé ! : l'assassinat des frères Rosselli, Paris, Larousse, coll. « L'histoire comme un roman », , 319 p. (ISBN 978-2-03-584595-5, présentation en ligne)

Liens externes

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