Hôtel de Matignon
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1722-1724 |
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État français |
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Adresse |
no 57, rue de Varenne |
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L'hôtel de Matignon, ou simplement Matignon, est un hôtel particulier situé au no 57, rue de Varenne, dans le 7e arrondissement de Paris.
Ayant appartenu à différentes familles aristocratiques, comme les Montmorency ou des notables comme Talleyrand en 1807, il est confisqué puis acheté par l'État français en 1922, et est, depuis 1935, la résidence officielle et le lieu de travail du chef du gouvernement français.
Le bâtiment comporte à l'arrière un parc de trois hectares.
Dans le langage courant et les médias, « Matignon » désigne par métonymie le Premier ministre ou ses services[1].
L'actuel hôte des lieux est Michel Barnier, Premier ministre depuis le .
Histoire
[modifier | modifier le code]L'hôtel particulier est bâti sur ordre de Christian-Louis de Montmorency-Luxembourg, prince de Tingry, qui le commande en 1722 à l'architecte Jean Courtonne, sur un terrain qu'il avait acheté en 1719.
Les travaux se révélant plus coûteux que prévu, le prince de Tingry vend l'hôtel en voie d'achèvement à Jacques III Goyon de Matignon le . Lors de l'acquisition, le nouveau propriétaire retire le marché de travaux à Courtonne, soupçonné d'indélicatesse, mais lui conserve la fonction d'architecte jusque dans les premiers mois de 1724.
Lorsque Courtonne est en définitive supplanté comme architecte par Antoine Mazin, le gros-œuvre et la décoration extérieure sont achevés et la décoration intérieure est en cours d'achèvement. Mazin se borne à réaliser le portail, dont Courtonne se plaignit d'ailleurs au motif que son couronnement est trop semblable à celui de l'hôtel.
Du XVIIIe siècle au milieu du XIXe siècle
[modifier | modifier le code]Jacques III Goyon de Matignon meurt le et son fils, Jacques IV Goyon de Matignon, hérite de l'hôtel. Par l'intermédiaire de sa femme, la princesse Louise-Hippolyte Grimaldi, il devient prince de Monaco sous le nom de Jacques Ier, et l'édifice passe donc ensuite à ses descendants, les princes de Monaco.
L’hôtel de Matignon est donc nommé ainsi en mémoire du lieu de naissance des comtes de Matignon, commune dans les Côtes-d’Armor. Un hôtel de cette commune porte également le nom d'« hôtel de Matignon ».
De 1757 à 1770, Maria Caterina Brignole Sale, princesse de Monaco, y réside, tandis que son époux, le prince Honoré III, préfère ses domaines normands ; la princesse est ainsi la première Brignole-Sale à marquer l'histoire de l'hôtel.
Le , Claude-Constant Juvénal d'Harville des Ursins épouse Antoinette Goyon de Matignon dans la chapelle de l'hôtel, aujourd'hui disparue. L’hôtel passe ensuite à la famille des marquis de Grave, à la suite de leur union avec la famille de Goyon-Matignon.
À la Révolution, le prince Honoré III reste à Paris. Sa principauté de Monaco est annexée en par la République française et son hôtel est placé sous séquestre. Arrêté en , il est emprisonné jusqu'en et, fatigué par sa détention, meurt en son hôtel le . Son fils aîné, Honoré IV vend l'hôtel en 1804 à l'homme d'affaires britannique Quentin Craufurd époux de Eleanore Sullivan, ancienne maîtresse du comte Axel de Fersen[2].
En 1807, ceux-ci l'échangent avec Talleyrand, qui, après y avoir organisé sous l'Empire de grandes fêtes en l'honneur d'ambassadeurs étrangers[3], ainsi que des réceptions retentissantes par leur luxe, doit le revendre en 1811 à Napoléon Ier.
En 1816, au début de la Restauration, Louis XVIII l'échange contre le palais de l'Élysée avec Bathilde d'Orléans, duchesse de Bourbon[3].
À sa mort en 1822, cette dernière le laisse à sa nièce Adélaïde d'Orléans, sœur du futur Louis-Philippe Ier, qui le fait occuper par une communauté de religieuses avant de le louer de 1838 à 1848 à Herman Thorn, un riche colonel américain qui affecte, au fond du parc de l'hôtel, le « Petit Trianon » à des offices religieux épiscopaliens. À son décès, Adélaïde d'Orléans le transmet à son neveu, Antoine d'Orléans, duc de Montpensier.
Loué par le duc de Montpensier à l'État, Matignon devient la résidence du général Cavaignac de juillet à décembre 1848 puis celle de Pierre Jules Baroche, président du Conseil d'État en 1852[réf. souhaitée].
L'hôtel de Galliera
[modifier | modifier le code]En 1852, le duc de Montpensier vend l'hôtel à Raffaele de Ferrari, duc de Galliera. Renommé « hôtel de Galliera », le bâtiment est remanié par l'architecte Félix Duban[3].
Après la mort du duc, prince de Lucedio, en 1876, sa veuve Maria de Brignole-Sale, duchesse de Galliera et arrière-petite-nièce de la princesse de Monaco, issue d'une des premières familles de Gênes qui a donné de nombreux doges, y réside seule jusqu'en 1886, entourée de quelque deux cents domestiques.
Elle accueille gracieusement le comte de Paris, neveu d'Antoine d'Orléans et prétendant au trône de France, avec sa famille, au rez-de-chaussée de l'hôtel, tandis que son fils réside dans une aile et qu'elle-même se réserve l'usage du premier étage et du parc.
Durant ces dix années de veuvage, la richissime duchesse fait preuve d'une générosité qui lui fait mériter le titre de grande philanthrope, finançant écoles, hôpitaux, musées, maisons de retraite et œuvres pieuses et de charité tant en France que dans sa ville natale.
En 1886, le comte de Paris, qui y demeure avec sa famille, y organise le une somptueuse fête en l'honneur des fiançailles de sa fille aînée, la princesse Amélie d'Orléans, avec le prince héritier du Portugal, dom Carlos de Bragança, réception strictement privée où ni le corps diplomatique, ni les représentants du pouvoir républicain n'ont été invités. Cependant, l'événement donne lieu à un énorme battage médiatique de la presse royaliste qui scandalise les républicains. Peu de temps après, des députés présentent un nouveau projet de loi d'exil devant la Chambre et celui-ci reçoit, cette fois, le soutien du gouvernement.
Le , après bien des débats, paraît une nouvelle loi d'exil qui touche les prétendants au trône et leur fils aîné en les obligeant à quitter le territoire national, ainsi que tous les autres princes français en les rayant des listes de l'armée. Averti des résultats du vote alors qu'il se trouve au château d'Eu, le comte de Paris prend la décision de quitter immédiatement la France.
Après le vote de la loi d'exil, la duchesse de Galliera offre son hôtel gracieusement à l'empereur d'Autriche-Hongrie, François-Joseph Ier d'Autriche pour en faire son ambassade après sa mort ; mais la duchesse, humiliée par l'ingratitude du gouvernement, décide de quitter la France et de léguer ses collections artistiques, non pas à la ville de Paris comme elle l'avait envisagé, mais à celle de Gênes[4].
Pendant l'exposition universelle de 1900, le compositeur et chef d'orchestre autrichien Gustav Mahler donne des concerts au Trocadéro et au Châtelet et séjourne alors à l'hôtel Matignon[5], qui était à l'époque l'ambassade d'Autriche-Hongrie[6].
Résidence du chef du gouvernement
[modifier | modifier le code]Devenu siège de l'ambassade d'Autriche, l'hôtel est mis sous séquestre au lendemain de la Première Guerre mondiale, comme bien ennemi.
En 1922, la France finit par acheter l'hôtel et en fait le siège des tribunaux arbitraux mixtes institués par le traité de Versailles[6],[7].
Après avoir songé à en faire un musée, puis des maisons d'habitation, Gaston Doumergue, ancien président de la République appelé à la présidence du Conseil, décide d'en faire la résidence du président du Conseil des ministres, décision qui ne devient effective qu’après l’adoption d’une loi sous son successeur Pierre-Étienne Flandin, en .
Selon le site de l’institution, Pierre-Étienne Flandin est le premier à s’y installer, en 1935[8]. Le livre L'Hôtel de Matignon (2018) indique pour sa part que la décision n’entre dans les faits qu'en 1936, rejoignant la volonté de Léon Blum de moderniser l'exécutif : jusque là, le chef du gouvernement n'avait pas de siège fixe, puisque ce titre accompagnait un autre portefeuille ministériel, dont le bâtiment abritait donc de façon temporaire les services du président du Conseil[9]. À cette époque, l'hôtel de Matignon offre un vaste appartement de fonction au premier étage[10].
Par la suite, tous les chefs du gouvernement font de l’hôtel de Matignon leur lieu de travail. Le , à la Libération de Paris, seul avec sa future femme Claire, Yvon Morandat prend possession de l'hôtel Matignon au nom du Gouvernement provisoire, mais Charles de Gaulle ne l'occupe pas, après la Seconde Guerre mondiale, s’installant à l’hôtel de Brienne (actuel ministère des Armées)[11].
Avec la Ve République, l'hôtel demeure la résidence officielle du chef du gouvernement, même si le titre de président du Conseil des ministres est remplacé par celui de Premier ministre.
Après la mairie de Paris en 2006 et le palais de l'Élysée en 2013, dans un contexte de réduction des budgets et de sobriété, les services du Premier ministre mettent en vente 10 % de ses caves, soit 1 400 bouteilles possédant un macaron à l'effigie de l'hôtel de Matignon. La vente, organisée par la maison Cornette de Saint-Cyr, a lieu le . Matignon entend désormais ne servir que des deuxièmes crus aux dîners officiels[12].
Parc
[modifier | modifier le code]L'hôtel comporte à l'arrière un parc de trois hectares, dessiné en 1902 par Achille Duchêne, qui est le plus grand espace vert privé de Paris avant celui du palais de l'Élysée et celui — public — de l'hôtel de Biron (musée Rodin) ; il allie perspective « à la française » et plantation « à l'anglaise ».
Le pavillon de musique, datant du XVIIIe siècle, est un petit bâtiment comportant trois chambres, une salle à manger, un salon ovale orné de boiseries et un autre salon ; il accueille des réunions et des dîners officiels[13],[14].
Le parc compte plusieurs éléments remarquables dont :
- une statue de Pomone du XVIIIe siècle, située à l'extrémité d'une allée de 111 tilleuls, taillés en marquise ;
- une glacière du XVIIIe siècle ; cette glacière permettait de conserver la glace récoltée pendant l'hiver.
À partir de , il fut ouvert au public le premier samedi de chaque mois, l'accès se faisant depuis une entrée annexe située no 36, rue de Babylone, mais cette ouverture a été annulée par la suite à cause du plan Vigipirate à l'instar de l'ouverture au public du palais de l’Élysée[15].
Il est visitable deux fois par an sur inscription : en juin lors des Rendez-vous aux Jardins[16], et en septembre lors des Journées européennes du patrimoine.
Espèces végétales
[modifier | modifier le code]On y trouve une centaine d'espèces différentes.
Depuis Raymond Barre, qui a planté un érable à sucre, chaque chef du gouvernement, à l'exception de Jacques Chirac, y a planté un arbre. La plantation d'un arbre par le Premier ministre est devenue une tradition de la vie politique française.
Protection
[modifier | modifier le code]L'hôtel est classé aux monuments historiques par arrêté du pour l'hôtel et ses dépendances, son parc et son pavillon de musique[17].
Accès
[modifier | modifier le code]Ce site est desservi par les stations de métro Rue du Bac et Varenne.
Références
[modifier | modifier le code]- Michelle Lecolle, « Métonymie dans la presse écrite: entre discours et langue », Travaux neuchâtelois de linguistique, nos 34-35, , p. 153–170 (ISSN 2504-205X, DOI 10.26034/tranel.2001.2554, lire en ligne, consulté le )
- Jacques de Lacretelle, Talleyrand, Hachette, , p. 213.
- Panneau Histoire de Paris devant l'hôtel de Matignon.
- Cf. La famille Brignole-Sale.
- (en) Guy Hartopp, Paris, a Concise Musical History, Vernon Press, (ISBN 978-1-62273-625-6, lire en ligne).
- Irmgard Roux, Les relations commerciales de l'Autriche avec les PECO, un siècle de partenariat privilégié ou l'effet Habsbourg, Tectum Verlag DE, 2001, [lire en ligne], p. 16
- Recueil des décisions des tribunaux arbitraux mixtes, Librairie de la société du recueil Sirey, Paris, 1922, p. 4.
- « La petite histoire de l’Hôtel de Matignon », sur gouvernement.fr (consulté le )
- « Chez le Premier ministre », L'Histoire no 454, décembre 2018, p. 82-83.
- Dominique Missika, Thérèse, le grand amour caché de Léon Blum, Alma Éditeur, , 262 p. (ISBN 978-2-36279-181-9), p. 185.
- « Hôtel de Brienne | Chemins de mémoire », sur www.cheminsdememoire.gouv.fr (consulté le )
- Romy Ducoulombier, « L'hôtel de Matignon liquide ses grands crus », in Le Figaro, encart « Culture », jeudi 28 novembre 2013, page 29.
- « Les rencontres secrètes du pavillon de musique », leparisien.fr, 16 juin 2002.
- Grégoire Biseau, « Élection présidentielle 2022 : l’ascension de Sébastien Lecornu, symbole de la droitisation du quinquennat Macron », sur lemonde.fr, (consulté le ).
- « Ouverture au public du jardin de l’Elysée : annulation pour cause de plan vigipirate » (consulté le )
- « Rendez-vous aux jardins - Patrimoine », sur gouvernement.fr (consulté le )
- « Ancien hôtel Matignon », sur pop.culture.gouv.fr (consulté le ).
Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Christian Albenque, David Bellamy, Monique Mosser, Alain-Charles Perrot et Gérald Rémy, L'Hôtel de Matignon, 2018, Paris, La Documentation française, un volume in 4°, 275 p. (ISBN 978 2 11 145265 7) .
Annexe
[modifier | modifier le code]Articles connexes
[modifier | modifier le code]- Résidences de la République française
- Liste des monuments historiques du 7e arrondissement de Paris
- Liste des monuments historiques protégés en 1923
- Liste des hôtels particuliers parisiens
Liens externes
[modifier | modifier le code]- Site officiel
- Ressources relatives à l'architecture :
- Le patrimoine de l'hôtel de Matignon
- Hôtel particulier monument historique à Paris
- Architecture civile du XVIIIe siècle
- Bâtiment rococo
- Résidence de la République française
- Bâtiment gouvernemental en France
- Monument historique dans le 7e arrondissement de Paris
- Monument historique classé en 1923
- Patrimoine du XVIIIe siècle
- Service du Premier ministre français
- Famille Brignole
- Résidence officielle d'un chef de gouvernement
- Édifice construit en 1724