Localisé dans un rayon de 4 km autour du bourg de Champlitte, ce site présente un vaste ensemble de pelouses sèches occupant l'extrémité d'un bombement du plateau dominant la vallée du Salon. Ce plateau est formé essentiellement de calcaire oolithique pour les pelouses et de formation argileuse à chailles de l'Oxfordien moyen aux environs de la mare des Cressières.
Sur la commune de Champlitte, l'activité agricole reste importante : élevage bovin et ovin, cultures céréalières, viticulture. Depuis les années soixante, les meilleurs terrains ont toujours été améliorés pour des gains de productivité ; de laitière, la production est devenue céréalière engendrant alors des modifications importantes du paysage. Cette intensification s'est accompagnée d'un abandon des secteurs les moins productifs, essentiellement les anciens pacages à moutons. La gestion forestière est axée sur le taillis sous futaie, avec l'enrésinement de quelques parcelles.
Sur une superficie de 309 ha, ce site présente plusieurs secteurs disjoints marqués par ce paysage de pelouses et prairies sèches (anciens pacages sur le Mont Gin, la Pâturie, le Prélot, les Pierrottes, Montarlot). Six habitats naturels d'intérêt communautaire sont recensés.
Les pelouses représentent une forte partie du site (21%). Plusieurs associations végétales sont distinguées : pelouses mésophiles à brome et sainfoin, pelouses sur substrat marneux à chlorette perfoliée et pelouses mésoxérophiles à brome et fétuque. Ces dernières, typiques de la région bourguignonne, sont les plus communes et elles présentent une originalité certaine au point de vue biogéographique qui les démarque du reste des pelouses de Franche-Comté. Conséquence d'un déficit d'entretien (pâturage, fauche), ces pelouses peuvent être localement envahies par des formations buissonnantes (prunellier, aubépine) qui marquent une évolution naturelle vers la forêt des plateaux. Ce contexte riche en lisières est très favorable à la biodiversité.
En mosaïque au sein de la pelouse méso-xérophile, les secteurs de dalles rocheuses montrent des sols squelettiques colonisés par des espèces adaptées à ces conditions extrêmes comme les orpins. Alors qu'ils sont bien implantés sur les premiers contreforts du massif jurassien, les éboulis méditerranéens occidentaux et thermophiles deviennent beaucoup plus rares en Haute-Saône où ils sont sporadiques. Malgré son enfrichement, celui de Montarlot reste caractéristique. Il faut noter le caractère primaire de cette formation issue directement de la gélifraction des bancs calcaires lors de la dernière période glaciaire. La source de matériaux semble aujourd'hui insuffisante pour entretenir un éboulis mobile.
A l'opposé, lorsque les sols sont profonds, apparaissent des cultures et les prairies mésophiles entretenues par la pâture ou la fauche. Dans ce dernier cas, elles sont d'intérêt communautaire lorsque le niveau de fertilisation reste faible à modéré. La flore est dominée par des graminées (fromental, dactyle…) et des plantes à fleur (centaurée jacée, épiaire étroite…). Les surfaces couvertes restent faibles sur le site proposé.
Parmi les différentes formations forestières présentes, seules les hêtraies-chênaies-charmaies à aspérule odorante sont d'intérêt communautaire. Il s'agit d'une formation assez largement répandue à l'étage collinéen où elle correspond au groupement climacique*. Potentiellement, ces forêts sont dominées par le hêtre ; sa faible proportion actuelle est la conséquence de l'origine récente de ces forêts (boisement naturel après abandon du pâturage ou de la vigne) ou du traitement en taillis sous futaie. Quelques secteurs de chênaie pubescente sont notés en haut des versant ensoleillés sur substrat très pierreux. L'intérêt écologique de ces formations est élevé.
Dans un contexte local où les points d'eau sont rares, la mare des Cressières constitue une unité isolée au sein d'une vaste zone cultivée sans bocage. Elle constitue l'un des rares sites franc-comtois où se reproduisent les 4 espèces de triton dont le triton crêté.
Huit plantes sont protégées ; elles caractérisent les pelouses, des orchidées en majeure partie et des espèces messicoles des cultures. Toutes sont peu répandues voire en cours d'extinction. L'ophrys abeille est présente sur plusieurs pelouses dont l'une constitue une des plus belles stations de Haute-Saône. C'est à Champlitte également que l'on trouve l'unique station du département pour l'ophrys araignée.
A la diversité floristique s'ajoute une faune variée, favorisée par la multiplicité des habitats. Parmi les oiseaux nicheurs recensés sur le site, sept sont d'intérêt européen. L'engoulevent d'Europe, L'alouette lulu, la pie-grièche écorcheur, affectionnent les milieux semi-ouverts à ouverts, ensoleillés et riches en insectes. L'oedicnème criard niche sur une des pelouses du site. La présence de cette espèce étant intiment liée à celle des moutons, l'évolution des pratiques agricoles, notamment le déclin du pastoralisme, est une menace pour l'espèce. Deux rapaces, la bondrée apivore et le milan royal, sont également observés sur le site qui constitue un terrain de chasse privilégié.
Les pelouses constituent également un site favorable aux reptiles comme le lézard vert, le lézard des murailles et la couleuvre verte et jaune qui y trouvent abri, poste de chasse et conditions optimales pour l'insolation contrôlée.
Côté insectes, les forêts du secteur hébergent le plus grand coléoptère d'Europe, le lucane cerf-volant dont les larves se développent dans les jeunes souches et les racines de chêne. Sur les pelouses, plusieurs espèces de papillons présentent le plus grand intérêt comme le damier de la succise ou l'azuré du serpolet. Les actions actuellement mises en œuvre doivent permettre d'assurer le maintien durable de ces deux insectes protégés.
Enfin, témoignant là aussi de la richesse entomologique des milieux, le site constitue une composante importante du territoire de chasse pour plusieurs espèces de chauves-souris telles que le grand murin et le petit rhinolophe, nichant à proximité du site. Ces deux espèces ont des exigences biologiques assez différentes. La première, glanant ses proies au sol dans un rayon de 10 km autour de la colonie, privilégie des zones à végétation rase, comme les futaies à strate arbustive réduite et certaines pelouses. La seconde évite les espaces ouverts et rejoint son terrain de chasse, jamais au delà de 2-3km du gîte, en évoluant le long des haies et autres alignements d'arbres. Il est donc indispensable de maintenir les corridors boisés présents sur le site tout en limitant le développement de la strate forestière arbustive et l'enfrichement des pelouses.
L'arrêt total des activités humaines qui maintenaient le milieu ouvert constitue en effet la principale menace pesant sur les pelouses de Champlitte. Il pouvait en effet favoriser l'évolution de la végétation naturelle vers un stade forestier banal s'accompagnant de la disparition du cortège faunistique associé. Les actions de conservation engagées visent essentiellement au maintien des pratiques agricoles extensives permettant, en particulier, de maintenir les pelouses en état. |